En 2014, lors de la 6e réforme de l’état, la compétence du bien-être animal est transférée du Fédéral vers les Régions. Jusque-là, en cas de maltraitance animale, la procédure était simple : « On se rendait avec la police sur place, le magistrat était avisé et il ordonnait la saisie », rappelle Fabrice Renard, de la SRPA de Liège. « Pour que l’animal n’attende pas chez nous jusqu’au jugement – ce qui pouvait alors prendre plusieurs années –, l’UBEA, qui était une entité également fédérale à l’époque, pouvait statuer avant pour ordonner le placement de l’animal dans une nouvelle famille. Cela fonctionnait à merveille. »
Mais avec la régionalisation, la justice liégeoise, qui est une entité fédérale, s’est logiquement déchargée et a mis la responsabilité des saisies sur le dos de l’UBEA, devenue régionale. « L’UBEA manquait d’effectifs et ne pouvait pas intervenir systématiquement. On s’est alors retrouvé avec des animaux morts, car nous ne sommes pas intervenus assez rapidement ! »
Carlo Di Antonio, ministre du Bien-Être Animal de l’époque, a entendu les refuges et a trouvé une solution : il a remis la capacité de saisie aux bourgmestres. « Désormais, nous fonctionnons comme avant la régionalisation, sauf que le bourgmestre ordonne la saisie et plus le parquet. Cela permet de sauver beaucoup plus d’animaux. À Liège, nous avons d’ailleurs mis une procédure assez unique en place avec une véritable unité composée de la SRPA, du vétérinaire communal (Philippe Schutters, NDLR), de la Ville et de la police. »
La sanction, là où le bât blesse
Si le système semble donc fonctionner, et que les animaux en danger sont bel et bien sauvés, c’est au niveau de la sanction que le bât blesse. Le parquet a 60 jours pour reprendre la main sur ces dossiers de maltraitance. « Mais dans les faits, ce n’est jamais le cas », poursuit Fabrice Renard. « Pourquoi ? Parce que je pense qu’en Belgique, à l’heure actuelle, la maltraitance animale est considérée comme de la petite délinquance. Je ne suis pas d’accord avec cette analyse. Prenons l’exemple d’une personne qui élève quelques chiots, elle les vend sans agrégation et on ne la punit pas. Dès lors, elle peut continuer… On peut donc se retrouver avec un véritable trafic d’animaux de grande ampleur. Le parquet reçoit systématiquement un PV en cas de saisie. Il pourrait donc, dans certains cas, les plus graves, reprendre la main et décider de poursuivre. Il ne le fait pas. Le signal que la justice envoie n’est pas le bon… »
Une version que le parquet nuance (lire ci-contre). Dans les faits, si le parquet ne poursuit pas, c’est au sanctionnateur de le faire. Et c’est donc une amende que risquent les propriétaires d’animaux peu regardant sur le bien-être de leur compagnon.
« L’amende peut varier (lire ci-dessous), mais le plus important pour nous, c’est que le dossier soit bien ficelé. Ainsi, l’agent sanctionnateur a tous les éléments en mains pour fixer le montant. Vous savez, la saisie n’est pas une punition en soi pour le maître, elle est là pour protéger l’animal. La ‘punition’ du maître, elle doit arriver d’ailleurs. »
721 signalements et 53 saisies en 2020
Cette année, la SRPA de Liège a déjà reçu 721 signalements de maltraitance animale, et 53 animaux ont été saisis. « L’année dernière, nous avions saisi 210 animaux soit, beaucoup plus. Une nette diminution cette année, qui s’explique notamment par le confinement. D’une part, nous sommes allés moins souvent sur le terrain. Et d’autre part, les gens étaient plus souvent chez eux, ils étaient donc présents pour leurs animaux de compagnie. »
Damien Leboutte, procureur de division, rappelle à juste titre qu’une amende est aussi une poursuite à part entière. « On nous demande de plus en plus de rediriger certaines matières vers les sanctions communales administratives (les SAC, NDLR). Tout ce qui est maltraitance animale fait l’objet d’un PV classique envoyé au parquet. »
Effectivement, lorsqu’il s’agit d’un animal qui manque un peu de place, de soin, et que ce n’est pas un comportement volontaire, une amende sera dressée. « Par contre, en cas de cruauté gratuite ou de négligence caractérisée, on poursuit ! On parle ici d’un chat qu’on utiliserait comme ballon de foot, ou d’un cheval qu’on mutilerait comme cela se passe beaucoup en France. On pourrait également se saisir pour un manque de soins ou de nourriture, si c’est par exemple quelque chose de récurrent. Maintenant, il faut qu’on nous alerte, qu’on nous dise que ce n’est pas la première fois. »